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Les images sont des interfaces plus que des matérieux ou des récits. Des interfaces ou des langues nouvelles du désir et de l’urgence d’être dans la vie, de vivre ses intensités, de toucherr un chaos qui menace sans cesse.

L’impulsion de dire quelque chose existe, elle est physique même, mais ce qui est dit ne précède pas l’image. Elle n’illustre pas mais dit.

Faire une image:

Ces gestes, ces fabrications d’images sont des essais pour fabriquer une grammaire qui emprunte à la puissance des matériaux, de la matière, qui est un collage de signes, qui émerge des affects du quotidien et notamment de la recherche spirituelle née au moment au je suis devenu père.
Ce travail d’imagerie est un catalyseur de désirs intenses, contradictoires, tournés vers l’extérieurs parfois et aussi recroquevillés. C’est une des raisons pour lesquelles la recherche formelle est éclatée passant de la figure à l’abstraction, de la peinture à la vidéo, de l’image aux objets. Peindre, graver, essuyer, coller sont des moyens de vivre les intensités de la vie, de participer aux évènements en les rendant plus présents.

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Dans l’atelier:

La question de ma présence « là » s’est posée la première fois que je me suis retrouvé dans un atelier seul. Croyant savoir ce que j’allais faire, la conscience de ma présence dans cet espace codé s’est révélée complexe. Elle est presque devenue l’objet de la recherche, ou au moins son miroir toujours présent. Être là, le matin à l’atelier, c’est accepter le mystère de sa présence au milieu d’un chaos de possibilités, de récits, d’inspirations. De ce chaos, la présence cherche à devenir plus forte, plus vraie en habitant des lieux nouveaux: inventer des techniques pour créer des images c’est pour moi une façon de rendre cette fragilité de la présence visible. C’est essayer de toujours reconnaître l’intensité, la performativité d’être là.

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Filmer:

Ma pratique vidéo partage avec le travail d’atelier un désir d’habiter et de dire l’expérience vécue autrement. Récemment entré dans un cycle de recherche au Royal College of Art à Londres, j’essaie de redéfinir ma relation au médium vidéo, notamment en remettant en question l’idée de faire une vidéo “à propos de”. Après avoir travaillé une démarche proche du documentaire, j’essaie aujourd’hui d’approcher mon sujet (la mémoire collective en Espagne et en Angleterre) où le film n’est pas “à propos de” mais plutôt un produit, une dérivation « à partir de ». Pris dans la même matière, la même empreinte que l’expérience, j’imagine le fait de “filmer” comme désignant le fait de faire un film plutôt que simplement tourner des images, comme une façon d’entrer plus fortement dans la logique de l’expérience sensible.